Mi mars, nous partirons d'Inverness pour rejoindre Tromso, au delà du cercle polaire au nord de la Norvège. Nous pouvons raisonnablement nous attendre à rencontrer du temps perturbé durant les 900 milles de cette traversée.

IMG 0079

 

la préparation d'une traversée aussi engagée est primordiale. il ne s'agit pas de prendre des informations météorologiques la veille du départ, mais au contraire, d'effectuer tout un travail en amont qui nous permettra de comprendre le mieux possible les conditions que nous allons rencontrer afin d'adapter nos décisions.

Nous vous proposons de partager la démarche adoptée sur "Sir-Ernst". Nous partons du principe que l'on maitrise les notions de base en météorologie marine. Le "net" regorge de site à vocation pédagogique et vous trouverez à la fin de cet article des liens et ouvrages recommandés.

Bon, il est temps de commencer et de tenter de répondre à cette question: partant le 8 mars !!!, pour rejoindre un port situé au nord du cercle polaire, dans des zones particulierement exposées aux perturbations atteignant l'europe du nord: A quelle sauce risquons nous d'être mangé !!!

Pour répondre à cette question, nous allons devoir élaborer une chronologie dans l'analyse de cartes, photos satellites et bulletins qui nous sont proposés. Nous avons environ 2 semaines pour rejoindre Bodo, où certains équipiers débarqueront avant que le reste de l'équipage continue sur Tromso.
Cela semble suffisant pour profiter de créneau "maniable", et éventuellement "faire le dos rond" lors d'escales accueillantes tout au lond du parcours. Pour cela, il s'agira d'avoir la vue la plus réaliste possible du film qui se déroulera au dessus de nos têtes, de bien comprendre le scénario prévu, d'être capable de le critiquer pour adapter ou remettre en question notre stratégie.

De quoi avons nous besoin ?

  • Au port:
    - cartes de surface, analyse et prévisions
    - cartes au niveau 500 hpa
    - champ de vents (les fameux fichiers GRIB)
    - photos satellites
    - relevés d'observations (navires et bouées, éventuellement relevés du vent par satellite)
    - Bulletins météorologiques

Vous noterez que les bulletins apparaissent qu'à la fin de notre processus d'analyse. Il nous paraît plus opportun de commencer notre travail à partir de nos propres réflexions, le bulletin n'interviendra que pour corroborer, où bien modifier notre analyse. Les prévisions seront ainsi mieux comprises et, une fois en mer, nous seront plus sensibles aux éventuels décalages entre ce qui est prévu et ce qui se passe vraiment.

Tout d'abord, un coup d'oeil sur un ensemble de cartes de surface et d'altitude nous donnant des indications sur ce qui se passe sur l'atlantique nord, justement là ou se créent et évoluent les perturbations qui risquent de nous affecter.

Cet ensemble de cartes de la NOAA est idéal.

Bra 500
On y trouve une analyse en surface et à 500hpa de la situation sur l'atlantique nord ainsi que des prévisions jusqu'à 96 heures, état de la mer inclus. De plus les cartes d'analyse en surface indiquent des relevés de vent de navires.
Par contre, ces cartes à 500 hpa ne reproduisent pas les isothermes.

A ce stade, et afin de bien situer les phénomènes, on consulte les photos satellites:
http://fr.sat24.com/fr  

Sat 24

ou bien : http://fr.allmetsat.com/

Bon, on commence à avoir une idée du scénario ! Nous allons mettre en application quelques règles simples (voir plus bas).

En surface, nous avons repérer les centres d'action qui nous intéressent. La pression au centre, leur vitesse de déplacement, leur évolutions*, se creusent-ils ?
En altitude, la courbure des isohyses, les modifications des vents en vitesse et orientation, l'angle avec lequel se croisent isohypses et isothermes, valeur du géopententiel, ...

On a donc besoin d'affiner. INDISPENSABLE ! ce site permet d'obtenir facilement toutes les informations issues de différents modèles.

    http://www2.wetter3.de/fax.html

Wetter3

nous préparons un article dédié spécialement à ce site, détaillant les différents modèles.

Maintenant, allons voir ce qui se passe sur l'eau ! pour cela commençons par les relevés de différentes bouées sur le parcours.  Outre le vent, nous avons accès au relevé des vagues, de pression, de température de l'air et du thermomètre mouillé, ainsi que de la visibilité su les plates-forme pétrolières.

http://www.ndbc.noaa.gov/maps/United_Kingdom.shtml


 
Bouees NOAA

Et complétons par des observations en temps réel :
http://www.oceanweather.com/data/ cliquer sur "marine observations"
observations

et sur http://www.infoclimat.fr/observations-meteo/temps-reel/inverness-dalcross/03059.html   mettre le nom de la station.

ou bien: http://www.xcweather.co.uk/

observations UK

Il est temps de regarder les cartes de prévisions. wetter2.wetter3 fera l'affaire, sinon directement pour les cartes de Bracknell:
http://weather.mailasail.com/Franks-Weather/Latest-Uk-Forecast-Charts-5-Days

ATTENTION, sur les cartes du Met Office, les isobares sont espacés de 4hpa en 4 hpa. Et oui, ce sont des cartes britanniques ...

Pour les "afficionados" aux fichiers GRIB, on consulte son logiciel favori. Sur l'ordinateur du bord, nous disposons de ZyGrib (qui affiche les GRIBS issus du modèle GFS) et de Squid (modèles GGS, CEP, GEM,KNMI et NOAA certains avec abonnement, + cartes synoptiques, photos satellites et observations)
A bord, nous utilisons la nouvelle application "Weathe4D 2" et disposons alors des modèles AROME et ARPEGE de METEOFRANCE.

Pour cette traversée, nous serons attentif lors de la consultation du site Internet de la Météorologie Norvégienne où nous disposons des cartes de champ de vent jusqu'au Spitzberg.

http://www.yr.no/kart/#lat=66.82762&lon=9.07054&zoom=5&laga=vind&proj=3575

vents Norway

D'autres sites permettent de visualiser directement les GRIBS qui nous intéressent:
http://www.weatheronline.co.uk/marine/weather?LEVEL=3&LANG=en&TIME=6&MN=gfs&CEL=C&SI=mph&MENU=0&LANG=en&WIND=g177&MODELLTYP=uv10

N'oublions les prévisions de vagues !
http://polar.ncep.noaa.gov/waves/viewer.shtml?-multi_1-NE_atlantic-

vagues NOAA

Avant d'aller déguster un excellent Whisky écossais, il nous reste à se pencher sur les prévisions pour avoir un avis officiel
(à ne pas oublier de les consigner sur le livre de bord !!! obligatoire pour les assurances et enquêtes éventuelles ...)

Nous sommes au Royaume-Uni, donc priorité au bulletin officiel du Met office.

Pour compléter avec d'autres bulletins : http://weather.mailasail.com/Franks-Weather/Northwest-European-Marine-Weather-Forecast-Texts

all bulletins UK

Nous y sommes presque, et puisque notre destination est la Norvège:
Météogramme zone par zone, du Danemark au pôle nord ! heure par heure, carte détaillée des champs de vent, courant  
http://www.yr.no/hav_og_kyst/kart_over_fiskebankene/

buletins zones norway

ainsi que les bulletins de MTO France
http://www.meteofrance.com/previsions-meteo-marine/bulletin/large/atlantique-et-mer-du-nord

bulletin MTOFrance


Pourquoi consulter les cartes à 500 hpa.

 Le niveau 500 hpa est indispensable pour comprendre les phénomènes en surface, leur génèse, leur déplacement et leur évolution. Bien entendu, d'autres sources d'informations viendront compléter cette analyse. Les seules cartes de surface ne permettent pas de comprendre ce qui va se passer,
elles ne sont qu'un "instantané" de la couche de surface parmi toutes celles qui composent l'atmosphère ! On pourrait se passer de ce travail dévolu normalement aux professionnels.  Mais une fois quitté le port, les navigateurs deviendront leur propre météorologiste. Ils pourront dans certains cas,
recevoir ce type de cartes et continuer leur analyse, critiquer la situation vécue et prendre les bonnes décisions stratégiques en répondant à ces questions:

  • à quel type de situation devons-nous nous attendre ?
  • les prévisions sont-elles évidentes ? la circulation en altitude présent-elles des caractéristiques pouvant dégénérer ?

A quoi servent-elles ?

  • A préciser la situation
  • Visualiser l'atmosphère en 3 dimensions
  • Alerter sur les évolutions rapides
  • Apprécier la stabilité des prévisions

Que représentent t-elles ?

Elle donne le relief d'une surface isobare. l'écartement des isohypses est en moyenne de 40 m en 40 m. C"est donc une carte en relief.

  
Pour étudier les variations de pression en altitude, on détermine un niveau de pression de référence
(500 hPa, par exemple) et on repère l'altitude où se trouve la pression considéré à la verticale de chaque point de mesure.
On obtient alors une carte isobare, où les lignes isohypses relient les points de même altitude,
à la pression de référence considérée (500 hPa dans ce cas).

Ainsi pour atteindre 500 hpa il faudra 5700m  dans certains endroits et 5560m dans d'autre (voir schém
a)          
                       Schemaantydepresniveau       

 Quelques règles simples d'analyse:

  • Au niveau moyen (5560 m), on associe une température de -20°
  • + les isohypses sont sérrées, + le vent est fort (comme les isobares)
  • On a l'équivalent en altitude de la règle de "Buys Ballot" en surface; dans l'hémisphère nord, le vent circule le long des isoihypses en laisssant les bas niveaux à droite (quand on fait face au vent).
  • Si les basses pressions d'altitude sont décalées par rapport aux basses pressions de surface, vers les températures moyennes (vers le NW sous nos latitudes), les dépressions sont dans leur phase de déplacement et de creusement. (vers le SW sous nos latitudes)
  • Si les hautes pressions d'altitude sont décalées par rapport aux hautes températures de surfaces, les anticyclones sont en phase de déplacement et d'extension
  • Dans les zones où les isolignes de 500 hpas présentent de faibles courbures, les phénomènes de surface se déplacent dans la direction du vent à 500 hpa environ à la moitié de la vitesse du vent à ce niveau.
  • Dans les zones où les isolignes à 500 hpa présentent de fortes courbures, les phénomènes se déplacent très lentement où sont stationnaires.
  • lorsque les isolignes sont quasiment fermées , le phénomène se déplace avec le vent le plus fort de son voisinage.
  • Des vents d'altitude forts au dessus d'une dépression aident à son creusement.
  • Dans les zones où les isohypses et les isothermes sont parallèles, l'évolution sera faible. Dans les zones où les isohypses et isothèrmes se coupent sont des zones à fortes évolutions.
  • Dans les zones où les isohypses et les isothermes sont parallèles, l'évolution sera faible. Dans les zones où les isohypses et isothèmes se coupent sont des zones à fortes évolutions.

Au sujet des thalwegs et dorsales d'altitude:

  • Lorsqu'un thalweg d'altitude est décalé par rapport à la dépression de surface, celle ci va continuer à se creuser.
  • Lorsqu'un talweg d'altitude descend en latitude, il s'intensifie.
  • Lorsque le thalweg d'altitude se transforme en dépression fermée, la dépression est mature.
  • Lorsque dépressions d'altitude et de surface sont "empilées", la dépression devient stationnaire et va se combler.
  • Lorsqu'un talweg d'altitude monte en latitude, son intensité diminue.
  • Lorsqu'une dorsale d'altitude monte en latitude, elle s'intensifie.
  • Lorsqu'une dorsale d'altitude descend en latitude, son intensité diminue.

D'autres règles sont applicables pour déterminer l'évolution des phénomènes, comblement ou creusement des perturbations et renforcement ou atténuation des anticyclones.
les advections thermiques se repèrent aux angles entre isothermes et isohypses.

  • une descente d'air froid (faibles épaisseurs) à l'arrière d'une montée d'air chaud (fortes épaisseur) suggère un creusement dépressionnaire, ou l'affaiblissement d'un anticyclone.
  • une descente d'air froid (fzibles épaisseurs) à l'avant d'une montée d'air chaud (fortes épaisseurs) suggère le renforcement des hautes pressions ou le comblement d'une dépression.

On sera également attentif à la courbure des isobares ainsi qu'aux zones de vent fort et de différence de flux qui peuvent être source de cyclogénèse.

Les cartes du FNMOC sont parfaites:  à visualiser sur http://www2.wetter3.de/fax.html

 

geopotentiel 850hpa


 Au sujet des fichiers GRIBS.

Tous les fichiers obtenus sans abonnement sont issus du modèle américain "GFS". La sortie du modèle est "brute" et ne passe donc pas entre les mains d'un prévisionniste. Les modifications de la force du vent au passage de front, les effets orographiques, les combinaisons avec la brise,
 les évolutions diurnes ne pas prises en compte et peuvent donc induire certaines erreurs ! Loin de tout relief, ils sont cependant très utiles et assez fiables.

On appliquera les corrections suivantes: Modèles GFS et ECMWF en Europe

   < 6nds               6/10 ndw            11/15 nds                       16/25 nds                          30/45 nds                      > 45 nds                 
   Petit temps + 2 nds + 3 nds + 5 nds + 10 nds Méfiance
  • Sous estimation des vents canalisés entre un ff et un relief (Cap Finisterre)
  • Sous estimation des vents dans les traînes
  • Surestimation des vents dans les centres d' Anticyclone et axes des dorsales (Grib = 5 nds / réalité = pas de vent !)
  • Mauvaise prise en compte des directions de vent <pour des vents inférieurs à 6 nds.M auvaise prise en compte des effets locaux
  • Sous estimation du mistral (d'ou l'intérêt à avoir accès par abonnement aux modèles AROME et ARPEGE de MétéoFrance)
  • Sous estimation des vents de NE en Manche (+ 5 nds)
  • Impossibilité de montrer le détail du vent dans les ff
  • Impossibilité de montrer les grains et rafales d'orages
  • Ne tient pas compte de possibles rafales (+ 50%)

Fiabilité: GFS et ECMWF sur l'atlantique Nord.

 2 premiers jours               TB                 passages de fronts/creusement des D et Accentuation des A                
    3 à 4 jours B  
5 à 6 jours indicatives  
+ de 6 jours donne une idée  
ailleurs et selon les zones (manque de relevés) la fiabilité est dégradée

 


Au sujet de QuickScat :

A consulter sur: http://manati.star.nesdis.noaa.gov/datasets/QuikSCATData.php/QuikSCATData.php

On y trouve des mesures du vent établies par des relevés satellitaires. Grace aux satellites en orbite polaire, on dispose en chaque point du globe, entre 2 et 4 relevés journaliers aves une précision de +/- 10° en direction et +/- 3 nds en vitesse.


 Nous détaillerons dans un prochain article, les conditions prévues pour la traversée et celles que nous aurons réellement rencontrées à bord ...

 D'autres liens pour compléter les cartes:
le site de la NOAA: http://weather.noaa.gov/fax/marsh.shtml

NOAA maps


Pour en savoir plus

Bonne approche de l'interprétation des cartes      http://www.meteo60.fr/modeles/explications_interpretation.htm

2 ouvrages indispensables :

         Mayencon           

malheureusement cet ouvrage semble épuisé aux EMOM !!!    

ne pas hésiter à se le procurer si vous le trouvez.     

MTO et Strategie devenu une bible ...