Sur "Sir-Ernst", nous avons eu la chance d'admirer de très nombreux oiseaux marins durant nos croisières écossaises. En particulier lors de notre escale à St Kilda et ses satellites. Plus d'un million d'oiseaux vient y nicher durant les mois d'été. Mais la réalité est terrifiante. 70 % des oiseaux marins ont disparu en seulement 60 ans, plus de 230 millions !

Les causes:  La disparition de ces 230 millions d'oiseaux de mer s'explique par la dégradation de l'écosystème marin. Les oiseaux se font piéger dans des engins de pêche, leurs proies disparaissent,  la pollution, et en particulier l'augmentation des plastiques ingérés, la destruction de l'habitat naturel, etc…
Dans tous les cas, le dénominateur commun, c'est l'homme, et ce de façon directe ou indirecte.

 La surpêche:

14 espèces comme les manchots, les macareux, les mouettes sont aujourd’hui des victimes collatérales de la surpêche. La disparition des poissons du fait de la surpêche affecte les populations d’oiseaux marins qui ont du mal à survivre. L'équation est simple, plus de poissons = plus d’oiseaux.

Comme les hommes, ils apprécient l'anchois, le hareng ou encore le maquereau. Seulement voilà, les oiseaux et les pêcheurs prélèvent chaque année des océans 80 millions de tonnes de poissons. Il n'y en a donc pas pour tout le monde, et les oiseaux ne trouvent plus assez de nourriture pour leurs petits.

 surpeche poissons

L'étude à laquelle nous nous référons (1) cumule l’équivalent de 438 années de données, elle met en lumière ainsi l’existence d’un seuil critique des populations de poissons, en-dessous duquel la survie des oiseaux serait remise en question.

Selon Philippe Cury, le chercheur qui a coordonné l’étude, quasiment tous les oiseaux marins  étudiés sont les victimes collatérales de la surpêche : manchots, bassans, mouettes, …  Pour les 14 espèces d’oiseaux marins  étudiées, on a comparé l’évolution de la population d’oiseaux à l’évolution de la biomasse de poissons disponibles pour leur alimentation dans 7 régions: Nouvelle-Zélande,  Californie, mer du Nord, Alaska, Afrique du Sud.
La conclusion n’a pas surpris; il y a bien un lien entre l’évolution de la biomasse de poissons et le succès de reproduction des oiseaux marins.
Concrètement, quand les stocks de poissons baissent en-deçà du tiers de leur niveau maximum, les oiseaux ont moins à manger et font beaucoup moins de poussins. Cette relation Proie / Prédateur montre que les oiseaux marins et les pêcheurs sont en compétition directe pour cette ressource

« Dans à peu près tous les écosystèmes étudiés, on voit que le seuil a été franchi à un moment ou un autre. Ce qu’il faut, c’est absolument ne pas rester longtemps sous ce seuil, car cela hypothèque alors le devenir des populations d’oiseaux », souligne le chercheur français. Ce phénomène d’importante chute de population a été confirmé chez des manchots en Afrique du Sud ou des macareux en mer du Nord.
La pression sur les oiseaux devient très forte car celle sur les poissons est encore plus forte. « Il y a une énorme tension » sur les populations de poissons qui sont surpêchées pour servir de nourriture à d’autres espèces de poissons élevées en aquaculture.

Il faut 2 kilos de poissons sauvages pour nourrir 1 kilo de poisson d’aquaculture, le problème va en s’amplifiant.

Sont surtout menacées des « espèces cruciales dans l’écosystème qui jouent un rôle extrêmement stabilisateur » dans son écosystème.

Ces espèces servent principalement pour fabriquer des huiles et des farines en aquaculture, : anchois, sardines et petits poissons côtiers représentent près d’un tiers des captures mondiales de pêche.

Que faire ? Constatant que les oiseaux marins n’ont plus assez de nourriture et que leur population a tendance à fortement décliner, l’étude suggère de définir un seuil critique de biomasse. Respecter ce seuil permettrait de préserver la survie des oiseaux dans le cadre de pratiques de pêche durable.

 Pollution:

 La majorité des oiseaux marins à travers le monde a déjà ingurgité du plastique, mais d’ici à 2050, quelque 99 % des albatros, manchots, mouettes et autres volatiles des mers seront touchés par cette pollution. (2)

plastiques

La pollution au plastique atteint en certains endroits le taux record de 580 000 morceaux de plastique par km2, cela représente un danger pour les oiseaux qui confondent leur surface colorée avec des aliments. Des oiseaux qui peuvent ainsi développer des maladies ou mourir s’ils ingèrent trop de plastique.
Une menace « géographiquement étendue »

Que faire ? une « gestion efficace des déchets peut réduire cette menace ». « Pour la première fois, nous disposons d’une prévision globale montrant à quelle échelle la pollution au plastique peut avoir des répercussions sur les espèces marines, et les résultats sont frappants », a estimé Chris Wilcox, chercheur à l’Agence nationale australienne pour la science (CSIRO).

Et de poursuivre : « Les estimations, basées sur des observations historiques, montrent qu’environ 90 % des oiseaux marins ont déjà avalé du plastique. C’est énorme et cela montre l’omniprésence de la pollution au plastique. »

La menace « est géographiquement étendue, généralisée et augmente rapidement » estiment les chercheurs, précisant que les zones les plus à risques se situent « aux limites de l’océan Austral, dans la mer de Tasman entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande », en raison de la forte pollution au plastique et de la grande diversité d’oiseaux marins dans ce secteur.

Depuis la commercialisation du plastique dans les années 1950, la production a doublé tous les onze ans, rappelle l’étude. « Toutefois, entre 2015 et 2026, la quantité totale de plastique produite sera équivalente à tout ce qui a déjà été fabriqué » depuis le début de la production de plastique…

Il y aura presque dix fois plus de déchets plastiques versés dans les océans en 2025

Sans surprise, cette tendance alarmiste est favorisée par la dégradation des océans pollués par quelques 5250 milliards de particules représentant 275.000 tonnes. "Le gros problème vient de la croissance économique rapide d’une partie du monde. Ce développement s’associe à une utilisation accrue du plastique, mais sans système de collecte et de gestion des déchets", est-il expliqué dans l’étude.

Pour vous convaincre !!!

 

sources:

1. 

Publiée le 22 décembre 11 dans la revue Science, une étude internationale, reprenant le travail de recherche représentant au total « 438 années » de données cumulées. Coordonnée par Philippe Cury, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), cette étude a été réalisée en partenariat avec de nombreuses universités et instituts comme l’Ifremer, le British Antarctic Survey, le Norwegian institute for nature research ou l’université de Glasgow. Citations faites à l’AFP.

 2. projet "Sea Around Us" au travers d'une recherche universitaire publiée dans la revue scientifique PlosOne et comptes rendus de l’Académie nationale américaine des sciences (PNAS)  (Pollution dûe aux plastiques). * Les chercheurs ont passé en revue des études réalisées entre 1962 et 2012 sur 135 espèces d’oiseaux marins. En comparaison, une étude datant du début des années 1960 montrait qu’à cette époque moins de 5 % des oiseaux marins étaient concernés.